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samedi 30 avril 2016

William Fitzsimmons est rattrapé par le fantôme de sa grand-mère, devenue une muse inconnue

Crédit : Erin Brown


On ne se dirige jamais vers une carrière de psychothérapeute par hasardEt pour cause, le destin semble encore rattraper l’artiste américain, William Fitzsimmons, avec l’histoire que dévoile son nouvel EP « Charleroi : Pittsburgh volume 2 » (1er avril 2016). « Charleroi » est la seconde moitié de l’album « Pittsburgh » (2015) qui parlait de sa grand-mère maternelle. Ainsi, le chanteur folk nous emmène cette fois-ci sur les traces d’une muse – sa grand-mère paternelle - si proche de lui mais qu’il n’a pourtant jamais rencontrée. L’histoire fera en sorte que Thelma, cette grand-mère ne connaisse jamais son fils, qu’elle a cru mort. De cette découverte, William Fitzsimmons créera 6 chansons d’une touchante sensibilité qu’il a rendues très poignantes sur la scène des trois Baudets, à Paris, le 20 avril 2016. En 2014,  le chanteur me confiait : « Au final, en voulant soigner les gens on essaye de se soigner soi-même ». Espérons que ces chansons pansent quelques plaies du passé. 
Autoportrait déformé par William Fitzsimmons 20.04.16 @Les3Baudets
De quoi parle ton nouvel EP « Charleroi : Pittsburgh volume 2 » ?
Il parle de Thelma, ma grand-mère biologique que je n’ai jamais connue.
Bébé, mon père a été emmené à l'hôpital parce qu’il avait la coqueluche. A la suite de cette hospitalisation, il a été adopté par un médecin qui est devenu son père.
Etant papa de deux enfants adoptés, j’ai eu envie de faire des recherches sur cette partie de ma famille que je ne connaissais pas, juste pour voir ce qu’il pouvait en ressortir, essayer de savoir d’où je venais. Et en 2015, j’ai retrouvé les traces de cette partie de la famille.
Mon père avait été déclaré mort bébé par erreur. Sa famille biologique n'a donc jamais cherché à le retrouver. Et malheureusement, sa mère est décédée plusieurs années avant d'avoir pu revoir son fils. Elle s'appelait Thelma et c'était ma grand-mère. Elle venait de Charleroi en Pennsylvanie.
Thelma est donc devenue la muse inconnue de cet album ?
Oui en quelque sorte, j’ai essayé de comprendre ce qu’elle représentait pour mon père et pour moi. C’est une situation bizarre : je lui ressemble et pourtant je n’ai jamais pu avoir aucun contact avec elle avant sa mort.
Est-ce l’histoire de ton père t’a donné envie d’adopter tes deux enfants ?
Il existe une expression en anglais qui dit « It was the last straw that broke the camel’s back » (ndlr : « c’est la goute d’eau qui fait déborder le vase ») qui signifie qu’il y avait déjà beaucoup de raisons qui me poussaient vers l’adoption et cette histoire a été un nouvel élément déclencheur. Ma femme m’a aussi rappelé que de part mon histoire, il était normal d’adopter. Et quand elle m’a dit ça, je me suis dit que c’était vrai, pourquoi je n’adopterai pas moi aussi.
Peut-on dire que cet EP « Charleroi : Pittsburgh volume 2 » est plus paisible, plus chargé d’émotions que les autres ?
Ils sont tous chargés d'émotions. Selon moi, dans cet EP je montre un côté plus résigné et je suppose, aussi de la colère. L’album « LIONS » était plus empreint de confusion et de colère. Mais l’adjectif paisible mon convient bien, même si c’est bizarre parce que je ne me sentais pas du tout paisible pendant la phase de création.  
William Fitzsimmons et Abby Gundersen à Paris Crédit : W.Fitzsimmons

De qui t’es-tu entouré pour faire cet EP ?
J’ai produit cet album moi-même mais j’ai introduit une amie, Abby Gundersen dans ce projet. Certains artistes ont différentes sensibilités quand ils jouent, certains jouent très rapidement, d’autres de façon violente. Et je voulais travailler avec Abby car en plus d’être chanteuse, elle joue du piano, du violon et elle a cette sensibilité, cette douceur qui s’accordent parfaitement avec le sujet sensible de l’album.
Après l’album Pittsburgh (2015) sur ta grand-mère maternelle, étais-tu pressé de faire ce volume 2 de l’album ?
Pittsburgh n’était pas censé avoir de suite. J’ai découvert le passé de Thelma lorsque j’étais en tournée pour l’album Pittsburgh. Je me suis dit que c’était le destin, l’autre partie de l’histoire était là.  Le bon côté des choses lorsqu’on a une mauvaise passe, c’est que l’on écrit rapidement, tu n’as plus qu’à prendre ta guitare et écrire. Ainsi, cet EP « Charleroi » a été écrit très rapidement.
Où te trouves-tu dans la vidéo du clip « A Part » ?
Dans une petite ville appelée, Alton (Illinois) au nord de Saint-Louis. C’est un mini Pittsburgh. C’est horrible ce que je vais dire mais je voulais trouver une ville avec la même tristesse que Pittsburgh.

Ce soir le concert se joue à guichet fermé. Est-ce que tu entretiens un lien particulier avec le public français ?
Pas spécialement. Chaque soir l’expérience est toujours différente mais je pense que la raison pour laquelle les gens viennent à mes concerts est presque toujours la même au-delà de la langue, du sexe, de l’âge. Il y a d’ailleurs parfois de grands écarts d’âge à mes concerts. Je crois que les gens veulent ressentir quelque chose de fort dans un environnement où ils se sentent bien tout en étant entouré. C’est une chose de pleurer tout seul mais partager des émotions avec d’autres personnes,  s’en est une autre. C’est très puissant, ça peut changer certaines perceptions.

Après les attaques terroristes à Paris, est-ce qu’en tant qu’artiste on réfléchit à deux fois avant de se produire sur scène ?
Bien sûr, j’ai des enfants. D’ailleurs, on a joué à Bruxelles dernièrement et notre vol a été annulé à cause des attentats. J’y pense parce que j’ai des enfants mais dans le cas contraire je ne crois pas que cela me préoccuperait. Je ne veux pas paraître ringard mais on dirait qu’à Bruxelles et à Paris, les gens ont l’air de suivre le cours de leur vie. Et c’est super. La première chose à laquelle j’ai pensé quand j’ai entendu parler du Bataclan est « c’est horrible » puis je me suis dit « ils s’attaquent à des gens qui font mon métier ». C’est plutôt égoïste comme pensée et je n’en suis pas fier. C’est encore tout nouveau, on est dans un monde en plein changement…
Crédit : Erin Brown
Tu es plutôt un utilisateur de Facebook, Instagram ou Twitter ? 
Ah ah… Je ne suis pas très doué avec ça ! J’adore entrer en contact avec les gens. J’aime encore parler avec les gens et oui je suis vieux ! Si tu me donnes le choix, je préfère m’asseoir et parler avec quelqu’un et je twitterai sur notre conversation plus tard…
As-tu d’autres projets ?
Oui, je vais faire de la musique pour un film. C’est encore un peu tôt pour en parler mais je suis très excité. Ma musique a déjà été utilisée pour la télévision (ndlr : Grey’s Anatomy) mais ce n’était pas pareil, là je vais réellement être impliqué dans la phase de création.
La musique est tellement géniale… J’adore cette sensation quand on regarde un film, qu’une musique commence et qu’on pleure car l’ensemble de la scène est magnifique. Je veux être impliqué dans ce genre de projet.
Et j’ai lu que tu allais aussi participer à un album « Say Yes ! » qui rend hommage à Elliott Smith (American Laundromat Records) qui sortira en octobre 2016.
C'est vrai, je chante "Say Yes", je suis un grand fan de cette chanson. J’ai été honoré qu’on me propose de participer à cet album d’autant plus qu’Elliott Smith m’a beaucoup influencé, c’est un héros pour moi. Ma version de la chanson est plutôt différente de l’originale. Je joue cette chanson depuis que je suis tout petit.
Peut-on s’attendre à un nouvel album en 2017 ?
Je ne sais pas (rires) ! Peut-être... si j’ai de l’inspiration pourquoi pas mais je ne tirerai pas trop sur la corde. Je l’ai fait une fois et je ne le referai jamais. Il faut parfois prendre le temps de s’asseoir et voir ce qu’il en sort. Une chanson, ça n’a rien de facile. C’est comme une relation amoureuse, il faut parfois savoir tirer la personne vers le haut et d’autre fois, se retirer.
 
William Fitzsimmons en ligne :
Discographie :
2016 : Charleroi : Pittsburgh Volume 2
2015 : Pittsburgh
2014 : LIONS
2011 : Gold in the shadows
2010 : Derivitaves
2009 : Live from the downtown studios
2008 : The sparrow and the crow
2006 : Goodnight
2005 : Until when we are ghosts