Autoportrait par Ruddy Descieux, 25 juillet 2012 café-restaurant Le Gymnase |
A 29 ans Ruddy Descieux a sorti le 21 juin son 1er EP XY et multiplie les concerts dans les lieux publics pour faire connaître sa musique. Rencontre avec le chanteur qui cumule deux passions: la musique et le dessin.
Dès l'âge de 6 ans Ruddy savait qu'il voulait suivre les traces de son père trompettiste, "un super héros le soir sur scène et un salarié dans l'administration la journée". C'est d'ailleurs son père qui lui fait goûter aux joies de la scène alors qu'il est encore très jeune.
Rapidement le jeune homme s'adonne à ses deux passions: le dessin et la musique "tout en donnant priorité à la musique". Très jeune, sa vie tourne autour de la musique puisqu'il entre en 1993, au Conservatoire d'Aubervilliers la Courneuve où il étudie la musicologie avec un programme spécifique consacré à l'enseignement de la trompette puis il obtient un bac musical.
"Chante dans ta trompette"
Malgré cette spécialisation dans son instrument, Ruddy ne délaisse pas pour autant le chant puisqu'il s'inscrit à la choral. En 2001, il se retrouvera même sur scène avec Jane Birkin alors qu'il est choriste au Printemps des Poètes.
Un jour, il prend à la lettre les conseils de son professeur de trompette "chante dans ta trompette" et s'inscrit à des cours de chant lyrique au conservatoire: "J'ai adoré et petit à petit cela m'a amené à trouver mon propre style."
Dès 16 ans, l'adolescent écrit sa première chanson en Anglais. Son goût pour la langue de Shakespeare lui vient de sa mère. "Même si elle n'est pas du tout anglophone, elle m'a bercé de ses récits de jeunesse quand à 19 ans elle a quitté sa Guadeloupe natale pour venir faire des études en Angleterre dans l'objectif de devenir hôtesse. Elle m'a transmis cette passion pour cette langue: la prononciation, les sonorités." "J'écoute aussi beaucoup de musiques anglo-saxonnes comme Bjork, Beirut, Beyoncé, Bon Iver, The Ting Tings et même Ella Fitzgerald". "Mes chansons me viennent souvent dans un charabia anglophone" "par contre, je ne décide pas de la langue dans laquelle j'écris, cela dépend de mon humeur".
Et face aux critiques que peuvent subir les artistes français lorsqu'ils chantent dans une autre langue que celle maternelle, Ruddy Descieux se défend: "J'ai toujours baigné dans plusieurs langues: le Français, le Créole et l'Anglais, je ne m'excuse donc pas d'écrire des textes en Anglais, ma démarche reste très naturelle."
2003: une année sombre
En 2003, le jeune homme rompt tout lien avec le conservatoire, "j'ai rejeté l'enseignement académique, j'avais envie de m'affranchir. Je décide alors d'intégrer un pôle du Conservatoire qui est censé pouvoir m'apporter la maîtrise de la musique électronique mais j'y suis resté très peu de temps car j'étais fatigué par ce rythme scolaire".
Ruddy quitte même son professeur de trompette qui le suit depuis de nombreuses années quand celui-ci lui répond après que Ruddy ait interprété un solo de Miles Davis qu'il ne peut plus rien faire pour lui ne maîtrisant pas les notions qu'impliquent le jazz.
L'artiste traverse alors une période sombre, faite "de colère, de dépression, de rejet, je me cherchais".
"Durant toutes ces années, j'ai servi un répertoire en tant qu'interprète et à cette période j'avais besoin de devenir quelqu'un". "Je continuais à écrire et puis mon père m'a offert un synthé et cela a été une révélation. J'explorais ma voix, j'écrivais et je jouais beaucoup". "Pour accompagner de façon primitive les premiers pas d'une chanson, cet instrument m'est très utile".
2006: Ruddy Descieux se dévoile côté dessin
En 2006, l'artiste a envie d'explorer ses compétences en dessin, il intègre alors une école d'art, de communication visuelle et d'architecture. Le parcours n'est pas facile notamment à cause de l'âge de Ruddy, plus avancé que celui des autres élèves." Aujourd'hui encore, cet art n'est pas laissé de côté puisque Ruddy a dessiné sa pochette d'EP en collaboration avec Julien Brothier avec qui il a fondé la société Graffiti numérique. En 2008, le duo expose même une série de portraits imaginaires très colorés, dessinés sur Iphone et transformés sur ordinateur. Au final, une trentaine de tableaux sera vendue. L'artiste ne cantonne donc pas ses performances dans une seul art.
2010: Ruddy Descieux reprend un chemin musical
En 2010, une amie Maryvette Lair l'invite sur scène durant un café-concert. Il rencontre alors Valentin Mussou, violoncelliste, qui souhaite travailler avec Ruddy. Malgré des tiroirs remplis de chansons, l'artiste arrive au studio Chkrrr avec de nouveaux textes et des partitions. La première chansons sur laquelle ils collaborent s'appellera 4 saisons.
Puis Valentin Mussou, co-réalisateur/co-arrangeur de XY, présente Ruddy à David Abel qui a besoin d'un trompettiste pour un titre de son EP, Ordinary Lives. Au final, le néo-zélandais sera l'auteur de certains textes de l'EP XY. Ruddy semble enchanté par cette rencontre: "David est un génie, il s'empare de la musique, des sonorités et petit à petit il construit un texte tellement proche des sonorités du départ que je n'ai aucune difficulté à le chanter. Je suis toujours sidéré par cette capacité."
"Dans cet EP j'exprime une large palette d'émotions, XY retrace mon parcours." "Le titre de l'EP est un clin d'oeil à la fin de mon prénom et de mon nom, c'est aussi la combinaison des chromosomes de l'homme, l'abscisse et l'ordonnée, cela m'évoque des choses assez terre à terre. Mais ce qui prime dans cette signification c'est le lien avec la fin de mon prénom et de mon nom, la musique est une partie de moi mais qui n'existe pas tout le temps dans ma vie". Ruddy efface donc un peu de lui-même pour que sa musique prenne vie.
Au final, l'EP XY propose sept chansons très éclectiques tout en restant très fluide dans son écoute, 4 saisons pourrait être influencé par l'univers d'Etienne Daho, tandis que le titre Pleasure rappelle des sons du groupe Aaron et atteint son apothéose au moment du canon de voix (4'14). Et on ne peut s'empêcher de se dire que si le chanteur Mika avait apporté sa touche (ou son nom) sur la chanson Ring le titre pourrait atteindre la cote de popularité qu'il mérite.
par Mathilde Hamet
Ruddy Descieux online